Parcours

1. Les années nanterroises (1968-1974)

2. La participation au développement de la psychologie cognitive à Paris VIII (1974-1984)

3. L’installation de la psychologie cognitive sur le campus d’Orsay (1984-1992)

4. Les activités du Groupe Cognition Humaine et le développement de la Réalité Virtuelle au sein du LIMSI-CNRS à Orsay (1992-2008)

4.1. L’installation du Groupe Cognition Humaine au LIMSI

4.2. Les activités de recherche menées au sein du LIMSI: Recherche fondamentale et valorisation dans un contexte d’interdisciplinarité

4.3. Responsabilités institutionnelles

4.4. Nouvelles perspectives: « Réalité Virtuelle et Cognition »

5. 2008, année charnière!

 

 

1. Les années nanterroises (1968-1974)

Le traitement de l’information figurative et sa conservation en mémoire constituent le thème général dans lequel se sont inscrits mes efforts de recherche depuis mon entrée au CNRS (au Laboratoire de Psychologie de la Culture, ERA 191, dirigée par R. Francès). Mon programme initial de recherche (1968-1971) a porté sur les activités cognitives mises en jeu par le film, chez l’enfant et chez l’adulte. C’est une problématique voisine que j’ai reprise dans un programme ultérieur de recherche (1971-1974), consacré à l’étude des processus mis en œuvre dans la mémorisation de matériels figuratifs, en l’occurrence des dessins, par comparaison avec la mémorisation de mots et de phrases. Ma thèse de troisième cycle, soutenue en 1974, a fait l’objet d’une publication aux Editions du CNRS en 1975, sous le titre Représentation Imagée et Activité de Mémorisation.

 

2. La participation au développement de la psychologie cognitive à Paris VIII (1974-1984)

A partir de 1974, j’ai engagé un programme d’étude de plus grande ampleur sur les formes imagées de la représentation cognitive, en examinant principalement leur rôle dans le traitement de l’information verbale. Cette période est celle où j’ai rejoint (en 1977) le Laboratoire de Psychologie de l’Université de Paris VIII (ERA 235, dirigée par J.-F. Le Ny), et où j’ai poursuivi mes activités de recherche jusqu’en 1984. Dans le cadre d’une analyse en traits de la signification verbale, je me suis intéressé aux traits sémantiques reflétant les propriétés physiques des objets. L’imagerie a été interprétée comme un processus s’appliquant électivement à ce sous-ensemble de traits, les traits figuratifs, auxquels il confère une actualité cognitive transitoire dans la mémoire de travail de l’individu. D’autres travaux expérimentaux m’ont également permis de mettre en évidence le rôle de l’imagerie dans la compréhension et la mémorisation de textes. Des investigations plus spécifiques m’ont dirigé enfin vers l’analyse des caractéristiques temporelles de l’activité d’imagerie, celle du savoir des individus à propos de l’imagerie, et celle de l’image dans la planification de l’action humaine.

Cette période a été marquée par plusieurs séjours de recherche à l’étranger (notamment un séjour aux Etats-Unis en 1981 dans le laboratoire de S. M. Kosslyn) et par la poursuite d’une politique active de publication, en particulier dans des revues d’audience internationale (entre autres, Cognition, le Journal of Experimental Psychology: Learning, Memory, and Cognition et Memory and Cognition). En 1979, j’ai publié un ouvrage de synthèse aux PUF, Les Images Mentales (ouvrage traduit en espagnol et en japonais). La synthèse de mes propres travaux a pris la forme d’une thèse d’Etat, soutenue en 1987, et qui a donné lieu à la publication d’un ouvrage, Image et Cognition, paru en 1989 aux PUF. Une édition en langue anglaise a été publiée en 1991 et une seconde édition française révisée a été publiée en 1994.

La fin de cette période a été marquée, en 1983, par mon passage à ce qui s’appelait alors la « maîtrise de recherche » (à laquelle s’est substituée depuis l’appellation de directeur de recherche de deuxième classe).

 

3. L’installation de la psychologie cognitive sur le campus d’Orsay (1984-1992)

La période qui s’est ouverte après l’achèvement de ma thèse d’Etat a été marquée par la concentration de mes travaux sur la question de l’image mentale dans ses rapports avec le traitement cognitif des textes descriptifs, ce traitement étant considéré à la fois sous l’angle de la compréhension et de la production. Ces recherches, qui avaient reçu le soutien de l’ARI Sciences de la Communication, puis du Programme Communication, exploraient les situations de communication dans lesquelles un individu entreprend de faire construire et conserver en mémoire par un interlocuteur la représentation d’une configuration dont ce dernier n’a pas de connaissance perceptive directe. Ce type de question se prêtait évidemment à d’intéressants rapprochements avec les autres disciplines engagées dans la recherche cognitive. Ainsi, la recherche sur les processus mis en œuvre dans la compréhension naturelle s’ouvrait de plus en plus sur des efforts de modélisation impliquant des interactions avec l’intelligence artificielle. D’autre part, la question de l’infrastructure nerveuse des processus d’imagerie conduisait à développer des contacts en direction des neurosciences cognitives. Ces travaux ont donné lieu à des publications dans des revues internationales (parmi lesquelles Memory and Cognition, Neuropsychologia, le European Journal of Cognitive Psychology et le Journal of Mental Imagery).

C’est dans ce paysage – celui de l’émergence des sciences cognitives et de leur progressive reconnaissance institutionnelle – qu’a été engagé, puis mené à son terme avec le soutien de l’Université de Paris-Sud, dès la fin de 1983, le projet d’installation d’une partie de l’équipe de Paris VIII sur le campus d’Orsay afin d’y fonder un laboratoire de recherche. J’ai été directement impliqué, avec J.-F. Le Ny, dans la création du Centre d’Etudes de Psychologie Cognitive (CEPCO). Le contexte particulièrement stimulant offert par les laboratoires d’Orsay a favorisé l’inscription de mes orientations de recherche dans la perspective pluridisciplinaire des sciences cognitives. Ceci fut rendu possible grâce aux interactions que j’ai engagées alors, notamment au LIMSI, avec des chercheurs en intelligence artificielle, mais aussi avec les chercheurs du CEA qui étaient, à l’époque, les pionniers de la recherche française en neuroimagerie fonctionnelle, à l’Hôpital d’Orsay.

C’est dans ce contexte que j’ai été conduit à prendre ma part de responsabilités institutionnelles, en assurant la responsabilité de l’équipe « Langage, Représentations et Connaissances » (membre du GDR 111, « Activités Cognitives et Conduites Complexes », dirigé alors par J. Leplat) et en soumettant à ce qui était alors la Section 30 du Comité National une demande de création d’URA. Malgré de très bons classements, la politique scientifique de cette époque ne permettait pas d’envisager la création de petites unités, mais, comme on le verra plus bas, ces efforts ont constitué la préfiguration de l’opération qui allait voir l’installation d’une équipe de psychologie cognitive au sein d’un laboratoire d’informatique à Orsay.

Les interactions développées à Orsay sur le terrain de la recherche cognitive ont pris une forme institutionnelle notable avec la création, à l’initiative de J.-F. Le Ny, de l’Institut des Sciences Cognitives et de la Communication (ISCC), qui fut le premier Réseau Régional francilien reconnu par le Programme Cognisciences. Au plan de la formation, j’ai participé à la création du DEA de Sciences Cognitives d’Orsay, où j’ai contribué jusqu’en 2008 aux enseignements et à l’encadrement des étudiants, y compris, à partir de 2004, dans la nouvelle formule de « mastère » Recherche Informatique. Cette période a également été marquée par mon engagement dans plusieurs opérations en faveur de la recherche cognitive au plan national, notamment au sein de l’Association pour la Recherche Cognitive (dont j’ai été Secrétaire de 1988 à 1990, puis Président de 1990 à 1992).

Cette même période a été marquée enfin par plusieurs initiatives de ma part en vue de promouvoir les interactions scientifiques au plan européen. J’ai été responsable d’un Réseau Européen de Laboratoires soutenu par le MRT de 1985 à 1990. A ce titre, j’ai organisé à Orsay le premier European Workshop on Imagery and Cognition (EWIC, NATO Advanced Research Workshop). Cette conférence a marqué le début d’une série de rencontres régulières des chercheurs européens en psychologie et neuropsychologie cognitives intéressés par l’imagerie mentale et, plus largement, la cognition visuo-spatiale. Les éditions successives de cette série de manifestations ont eu lieu à Padoue (1988), Aberdeen (1990), La Laguna (1992), Sarrebruck (1994), Oslo (1997), Windsor Great Park (1999). J’ai organisé de nouveau la huitième édition de cette manifestation, qui a eu lieu en 2001 à Saint-Malo et qui a intégré une forte contribution en neuroimagerie. Les éditions suivantes d’EWIC ont eu lieu à Pavie (2003), St. Andrews (2005), Utrecht (2007), Helsinki (2010) et Bochum (2012). La prochaine a lieu à Chypre en 2014. Enfin, en tant que membre élu du Conseil de la European Society for Cognitive Psychology, j’ai organisé la Cinquième Conférence de la Société à Paris, en 1992.

C’est à la fin de cette période que j’ai bénéficié de la promotion au grade de directeur de recherche de première classe (1991).

 

4. Les activités du Groupe Cognition Humaine et le développement de la Réalité Virtuelle au sein du LIMSI-CNRS à Orsay (1992-2008)

4.1. L’installation du Groupe Cognition Humaine au LIMSI

Le lancement du Programme Cognisciences par le CNRS, en 1990, a constitué pour la communauté des sciences cognitives l’occasion d’un développement des collaborations interdisciplinaires qui n’avait pas encore connu d’équivalent. Pour ce qui concernait alors mes propres projets, les conditions étaient réunies pour envisager une opération structurante significative, que j’ai engagée en 1991 en soumettant au Programme Cognisciences la proposition de création d’une ATIPE (Action Thématique et Incitative sur Programmes et Equipes). L’objectif de cette ATIPE était d’établir une structure de recherche en psychologie cognitive au sein d’un laboratoire d’informatique particulièrement ouvert à l’interdisciplinarité. Le choix était facile, compte tenu de la présence sur le campus d’Orsay d’un laboratoire propre du CNRS, le LIMSI (UPR 3251), avec lequel j’entretenais déjà des collaborations régulières. Laboratoire-phare dans le domaine de la communication homme-machine (CHM), le LIMSI souhaitait à cette époque élargir son champ de compétence en intégrant des spécialistes de la cognition humaine. L’installation d’une équipe de psychologie cognitive au sein du LIMSI a donc été rendue possible par la conjonction de trois volontés: celle du Programme Cognisciences, qui a sélectionné la proposition soumise conjointement par J. Mariani, directeur du LIMSI, et moi-même et lui a apporté son soutien moral et financier; celle du LIMSI, qui, affichant son souhait de renforcer l’interactivité scientifique déjà existante, a également offert des surfaces, de la logistique et des services communs; la mienne propre et celle des membres du groupe dont j’étais responsable, qui apportaient leur potentiel de recherche et leur propre goût pour le travail interdisciplinaire sur des thématiques cognitives en fort développement.

Ainsi se trouvait lancée une opération répondant à une double motivation: scientifique et institutionnelle. L’opération scientifique consistait à importer au sein d’un laboratoire d’informatique réputé pour ses travaux en communication homme-machine une structure de recherche spécialisée dans l’étude des activités cognitives humaines. En particulier, notre projet d’insertion était justifié par notre intérêt pour les activités cognitives mises en œuvre par les individus dans leurs interactions avec des systèmes artificiels et, plus généralement, par notre conviction de la fécondité des échanges de modèles et de concepts entre la psychologie cognitive et l’intelligence artificielle, dans la perspective pluridisciplinaire des sciences cognitives. Du point de vue institutionnel, cette opération donnait une assise à la psychologie cognitive au sein d’un laboratoire d’informatique de grande renommée.

Il est important de souligner que cette opération s’inscrivait dans le fil de la politique d’accueil scientifique mise en place par J. Mariani, alors directeur du LIMSI et responsable du Département CHM. Cette politique était fondée sur un esprit d’ouverture du Département à l’égard de nouvelles disciplines, auxquelles étaient reconnues non seulement leur identité, mais aussi la responsabilité du plein exercice de leur politique scientifique, en concertation avec le Département CHM. Cette politique scientifique, fixée avec l’approbation de la Section 29 dans notre cas, comportait un volet de recherche fondamentale en psychologie cognitive et un volet d’opérations interdisciplinaires sur des thèmes intéressant la CHM.

L’Equipe Cognition Humaine a été créée en tant qu’ATIPE du Programme Cognisciences le 1er janvier 1992 pour quatre ans, avec un budget de niveau très satisfaisant. L’Equipe a reçu le soutien du Programme, le relais étant pris, après la fin du Programme, par le GIS Sciences de la Cognition (au titre des années 1995 et 1996). En 1994, l’Equipe Cognition Humaine a pris le nom de Groupe Cognition Humaine, comme signe attestant de son intégration au sein du LIMSI, où les entités constitutives des Départements sont appelées « Groupes ». Il est à noter que sur le total des huit ATIPEs créées par Cognisciences, la nôtre fut la première ATIPE de psychologie créée au sein d’un laboratoire SPI. La greffe a généralement été considérée comme réussie, par la forme d’interdisciplinarité originale qu’elle a rendue possible. C’est ce qu’ont exprimé, en des termes très soutenus, les instances scientifiques chargées de l’évaluation du LIMSI, en particulier les Sections 7 et 29 du Comité National et les Comités Scientifiques et Comités d’Evaluation missionnés par le CNRS.

Le Groupe Cognition Humaine a ainsi développé son activité au sein du Département CHM du LIMSI pendant 9 années sous la responsabilité de J. Mariani (l’année 1992, le quadriennal 1993-1996 et le quadriennal 1997-2000). A partir de janvier 2001, la direction du laboratoire a été assurée par P. Le Quéré. Un nouveau responsable, G. Sabah, a été en charge du Département CHM jusqu’en juillet 2002. Cette responsabilité a été exercée, à partir d’octobre 2002, par P. Tarroux. La fin du quadriennal 2001-2004 a marqué la treizième année de l’activité du Groupe Cognition Humaine au sein du LIMSI, avant le redéploiement de son activité (décrit ci-dessous).

4.2. Les activités de recherche menées au sein du LIMSI: Recherche fondamentale et valorisation dans un contexte d’interdisciplinarité

Le Groupe Cognition Humaine a compté au total une dizaine de permanents (chercheurs, enseignants-chercheurs, ingénieurs CNRS) et une vingtaine de doctorants. Les psychologues présents au LIMSI sont des chercheurs dont la démarche théorique et la méthodologie sont celles de la psychologie cognitive expérimentale et qui donnent leur spécificité aux opérations menées au sein du LIMSI. L’objectif est de rendre compte des processus par lesquels les individus traitent l’information extraite de leur environnement et en construisent des représentations utilisables dans leurs conduites. Les connaissances acquises sur la construction de représentations mentales à partir du traitement du langage sont mises au service des travaux pluridisciplinaires menés au LIMSI sur les formes naturelles et artificielles de l’intelligence et sur la communication homme-machine. Deux thématiques majeures ont été développées au sein du Groupe Cognition Humaine: le rôle de l’image et du langage dans la cognition spatiale et le traitement cognitif des textes. Mon implication dans la formation en psychologie et en sciences cognitives s’est concrétisée par 18 doctorats soutenus de 1992 à 2010.

Le contexte dans lequel nous travaillons constitue une incitation permanente à penser notre activité scientifique à la fois en termes de contribution à la connaissance fondamentale, mais aussi en termes de valorisation. Les collaborations développées au sein du LIMSI sont nombreuses, appuyées par des soutiens obtenus dans des projets communs auprès d’agences de moyens nationales et d’industriels intéressés par les aspects cognitifs des domaines dont ils traitent. Ces collaborations nous impliquent parfois dans des opérations de recherche marquées de confidentialité industrielle. Les collaborations ont pris également la forme d’encadrements communs de DEA et de thèses, formule que j’ai introduite au LIMSI dès le début de notre installation. Ces collaborations sont attestées par des publications communes dans des revues nationales et internationales.

Les travaux que je mène ou que j’encadre sur l’image, le langage et la cognition spatiale visent à rendre compte des processus par lesquels des individus échangent des connaissances sur leur environnement et inscrivent ces connaissances en mémoire en vue d’utilisations ultérieures. Les résultats de ces travaux sont mis au service de la conception de systèmes informatisés d’aide à la navigation. En outre, une collaboration étroite et continue avec des équipes d’imagerie neurofonctionnelle m’a permis de contribuer à la connaissance de l’architecture cérébrale intéressée par le traitement de l’image et du langage. Mes travaux ont largement bénéficié de la dynamique créée, entre 1993 et 1995, par les échanges au sein de l’Axe Thématique National « Représentation de l’Espace » soutenu par le Programme Cognisciences, associant quatre groupes très actifs de la communauté française des sciences cognitives: Marseille (C. Thinus-Blanc), Orsay (M. Denis), Paris (A. Berthoz) et Toulouse (M. Borillo).

Les travaux menés dans l’équipe ont toujours été soutenus par une activité contractuelle importante. Outre les financements obtenus du Programme Cognisciences, du PRC Communication Homme-Machine, du GIS Sciences de la Cognition, de l’ACI Cognitique et de l’ACI Ville du MENRT, j’ai bénéficié de contrats de la DGA et de contrats avec des organismes ou groupes industriels intéressés par les problèmes de navigation et d’aide au déplacement, tels que la Régie Renault, PSA Peugeot Citroën et la RATP. J’ai plus récemment développé une collaboration de recherche de longue durée sur la téléphonie mobile avec le Département R&D de Bouygues Telecom (1998-2004). Cette collaboration est à l’origine du plus important contrat industriel qui ait été signé par le LIMSI jusqu’alors.

Les relations entre l’image, le langage et la cognition spatiale constituent une thématique à fort potentiel interdisciplinaire, identifiée par les agences de moyens nationales, européennes et nord-américaines comme particulièrement importante, à la fois pour la recherche fondamentale et dans le domaine des applications. Au cours des années, l’accroissement de mon implication dans la communauté internationale et interdisciplinaire des sciences cognitives appliquées au domaine de l’espace s’est traduit par ma participation au lancement de la revue interdisciplinaire Spatial Cognition and Computation (au Comité Editorial de laquelle je figure depuis sa création en 1998), ainsi que ma participation invitée régulière, depuis 1999, aux Comités de Programme, puis au « Steering Committee », de la série des Conferences on Spatial Information Theory (COSIT). Avec C. Claramunt (Ecole Navale), organisateur principal, j’ai participé à l’organisation de COSIT 2009, première édition de cette conférence à se tenir en France. J’ai été associé aux activités de l’International Quality Network sur la cognition spatiale coordonné par C. Freksa (Brême) et soutenu par le DAAD (2002 et 2003). Je prends également comme une marque spéciale de reconnaissance le fait d’avoir été invité à être « le » psychologue (français) présent sur le Comité d’Organisation d’un symposium de l’American Association of Artificial Intelligence (AAAI) qui a eu lieu à Stanford, USA, au printemps 2005. J’ajoute que les travaux menés dans le Groupe Cognition Humaine en matière de description d’itinéraires ont fait l’objet d’une invitation dans un ouvrage édité par G. L. Allen en 2006 chez Erlbaum, Applied Spatial Cognition: From Research to Cognitive Technology, dans le seul chapitre de cet ouvrage confié à un auteur français.

Parallèlement à ces recherches fondamentales et à ces travaux de valorisation, j’ai entretenu une collaboration soutenue avec deux laboratoires de premier plan en neuroimagerie fonctionnelle, au GIP Cyceron de Caen (B. Mazoyer) et à l’Hôpital d’Orsay (D. Le Bihan). Avec B. Mazoyer, en 1997, j’ai organisé une école de formation sur la neuroimagerie financée par le GIS Sciences de la Cognition. Pendant deux ans (2002 et 2003), j’ai été membre de l’Advisory Group du Centre for Biomedical Functional Imaging de l’Université d’Aberdeen, chargé d’évaluer les soumissions faites dans le cadre d’un contrat de l’Union Européenne (Access to Large Scale Facilities).

Enfin, au cours de mes années au LIMSI, j’ai poursuivi l’effort de valorisation de mes travaux dans des supports de publication renommés en psychologie (Journal of Experimental Psychology: Learning, Memory, and Cognition, Memory and Cognition, Quarterly Journal of Experimental Psychology, British Journal of Psychology, European Journal of Cognitive Psychology, Psychological Research, Applied Cognitive Psychology, Journal of Mental Imagery, Acta Psychologica), en neuropsychologie (Neuropsychologia, Cognitive Neuropsychology) et en neurosciences cognitives (Cerebral Cortex, Journal of Neuroscience, Journal of Cognitive Neuroscience, NeuroReport, NeuroImage, Cognitive Brain Research). J’ai également assuré l’édition ou la co-édition de plusieurs ouvrages: Models of Visuospatial Cognition (1996) et Langage et Cognition Spatiale (1997). J’ai également été Editeur Invité (avec E. Mellet et S. M. Kosslyn) d’un numéro spécial du European Journal of Cognitive Psychology intitulé « Neuroimaging of Mental Imagery » (paru en 2004).

Au plan international, le Réseau Européen Capital Humain et Mobilité que j’ai dirigé de 1994 à 1997 s’est conclu en 2001 sous la forme d’un ouvrage paru chez Psychology Press, Imagery, Language, and Visuo-spatial Thinking. En outre, mes contacts réguliers avec S. M. Kosslyn (Harvard) et B. Tversky (Stanford, puis Columbia) ont donné lieu à de fructueuses opérations de coopération scientifique. En 2004, B. Tversky a accueilli une de mes anciennes doctorantes (A. Tom) à Stanford pour un séjour post-doctoral d’une année financé par la DGA. En 2006, S. M. Kosslyn a accueilli un de mes anciens doctorants (G. Borst) pour un séjour post-doctoral d’une année également financé par la DGA, renouvelé les trois années suivantes par un financement de Harvard. G. Borst est, depuis 2010, titulaire d’une chaire Université Paris Descartes – CNRS, membre du Laboratoire de Psychologie du Développement et de l’Education de l’Enfant, à la Sorbonne.

Mes spécialités thématiques m’ont conduit à accepter la position d’Editeur Associé de deux journaux de très bon, voire d’excellent standard international: le European Journal of Cognitive Psychology (de 1997 à 2000) et le Quarterly Journal of Experimental Psychology (de 2001 à 2004). En 2005, j’ai été invité à assurer une fonction d’Editeur pour la revue internationale Psychological Research, publiée par Springer, version moderne et de langue anglaise de Psychologische Forschung, la célèbre revue fondée par M. Wertheimer, W. Köhler et K. Koffka. Un numéro spécial sur la cognition spatiale, à l’édition duquel a été associé J. M. Loomis, est paru en 2007 sous le titre « Human Spatial Cognition: Memory, Navigation, and Environmental Learning ». J’ai assuré cette fonction éditoriale jusqu’à la fin de l’année 2008.

4.3. Responsabilités institutionnelles

La période qui s’est écoulée depuis le début des années 1990 a vu se multiplier pour moi les responsabilités institutionnelles. Tout d’abord, au plan régional, mon implication dans l’animation de la communauté des sciences cognitives a été particulièrement marquée à partir de 1998, date où j’ai été élu pour assurer, jusqu’en 2002, la co-responsabilité (avec J. Lorenceau) du Réseau de Sciences Cognitives d’Ile-de-France (50 laboratoires, 750 chercheurs) soutenu par l’ACI Cognitique. Un des projets auxquels J. Lorenceau et moi-même avons travaillé intensément est la création d’une UMS permettant de pérenniser le Relais d’Information sur les Sciences de la Cognition (structure d’information et de documentation du Réseau). Cette création est intervenue en janvier 2002 et J. Lorenceau a pris la direction de l’unité. Enfin, de 1999 à 2002, j’ai assuré, avec M. Hickmann, l’animation de l’Atelier « Représentation de l’Espace », soutenu par le Réseau.

Au plan national, en 1991, j’ai été nommé membre de la Section 29 du Comité National (« Fonctions Mentales, Neurosciences Intégratives, Comportements »). Mon profil scientifique a probablement été à l’origine de plusieurs responsabilités plus spécifiques qui m’ont été confiées alors: représentation de la Section 29 au Comité de Programme du PIR Cognisciences; présidence du groupe « Sciences de la Cognition et de la Communication » pour le Rapport de Conjoncture 1992 du Comité National (publié en 1993); organisation d’un Colloque Interdisciplinaire du Comité National (« Images et Langages », Paris, 1992). En 1996, j’ai été de nouveau nommé à la Section après la disparition prématurée de J. Requin. En 2000, j’ai assuré l’intérim de la présidence de la Section 29 après le départ de C. Destrade. J’ai été de nouveau nommé membre de la Section pour la mandature suivante (2000-2004). J’ai été membre du Bureau et représentant de la Section dans le premier Conseil de Département des STIC (2000-2001). A ce titre, j’ai été chargé d’animer un groupe de travail et j’ai assuré la coordination d’un rapport intitulé « L’Homme Biologique et Cognitif dans la Boucle Informationnelle », destiné à alimenter la réflexion prospective du Département STIC. Enfin, de 2001 à 2004, j’ai été membre du Comité Scientifique du Programme Interdisciplinaire du CNRS « Cognition et Traitement de l’Information » et, de 2003 à 2005, j’ai été membre du Comité Scientifique de l’ACI du Ministère Délégué à la Recherche et aux Nouvelles Technologies « Espaces et Territoires ».

En 2003, j’ai été élu, au titre de la Section 29, membre de la Commission Interdisciplinaire « Cognition, Langage, Traitement de l’Information: Systèmes Naturels et Artificiels » (CID 45), l’une des cinq CID créées en 2002 par le CNRS en vue d’effectuer des recrutements de chercheurs sur des profils interdisciplinaires. J’ai été élu Président de la CID 45, rôle que j’ai assuré jusqu’à la fin du mandat du Comité National (août 2004). Lors de la Réunion Plénière du Comité National (30 juin 2003), j’ai été en charge de l’animation, puis de la rédaction du compte rendu des travaux de l’Atelier sur l’Interdisciplinarité. En 2005, dans le cadre de la nouvelle mandature du Comité National, la CID 45 a été recréée et j’ai fait partie des membres nommés (sur proposition de la Direction des STIC). J’ai été de nouveau élu Président de la CID. En outre, en 2006, j’ai été nommé pour assurer la présence de la psychologie cognitive au sein du Comité Scientifique Disciplinaire « Sciences Humaines et Sociales » de l’Agence Nationale de la Recherche. En 2007, 2008 et 2009, j’ai assuré la présidence de l’un des deux CSD couvrant le domaine. Enfin, j’ai été invité par le European Research Council à assurer la présidence du panel d’évaluation des projets soumis au titre des « Advanced Grants » dans le domaine des sciences cognitives (Panel SH4-B, « The Human Mind and its Complexity », 2008-2013).

J’ai également pris dans cette période plusieurs responsabilités internationales. De 1992 à 2001, j’ai été Vice-Président de la Société Française de Psychologie (SFP), en charge des Relations Internationales (poste que j’ai de nouveau occupé de 2007 à 2009). Depuis 2008, j’assure la présidence du Comité National Français de Psychologie Scientifique (CNFPS), à travers lequel est assurée la liaison de notre discipline avec l’Académie des Sciences. En 1992, mon élection au Comité Exécutif de l’Union Internationale de Psychologie Scientifique (International Union of Psychological Science, IUPsyS) a permis à la France de retrouver une place qu’elle avait perdue quelques années auparavant au sein de cette organisation. Dans ce Comité, j’ai été en charge du Research Network Project « Psychology and Cognitive Science », devenu « Psychology in a Multidisciplinary Environment » en 1997. J’ai pu introduire, à travers l’IUPsyS, des propositions donnant à la psychologie un rôle d’initiative au sein des structures internationales de la recherche, notamment l’International Council for Science (ICSU), auprès duquel j’ai obtenu un soutien substantiel pour l’organisation conjointe d’activités scientifiques par l’IUPsyS et l’International Brain Research Organization (IBRO) (notamment, un séminaire international de formation aux techniques de neuroimagerie, qui a eu lieu en Suède en juillet 2000).

Lors du Congrès de Stockholm (juillet 2000), j’ai été élu Président de l’IUPsyS, fonction que j’ai assurée jusqu’en 2004 (j’ai occupé ensuite, jusqu’en 2008, le poste de « Past President », Président du Comité sur la Communication et les Publications). Choisi par les délégués de 66 pays pour assurer la représentation de la psychologie au plan international, j’ai relevé avec satisfaction le fait que ma forte implication au service de l’interdisciplinarité (tant au plan de mes travaux personnels que de mes responsabilités institutionnelles) n’avait pas fondamentalement changé mon identité disciplinaire aux yeux de ma propre communauté. Il est à noter, enfin, que cette présidence est une fonction qui n’était échue à la France qu’à deux reprises seulement au cours des cinquante années d’existence de l’IUPsyS (H. Piéron, à la fondation de l’Union en 1951, et P. Fraisse, de 1966 à 1969).

Enfin, lors de l’Assemblée Générale du Conseil International pour la Science (International Council for Science, ICSU), en septembre 2002, j’ai été élu membre du Bureau Exécutif de cette instance sur l’un des quatre postes destinés à représenter les Unions Scientifiques Internationales. C’est la première fois que la psychologie se trouvait ainsi représentée depuis la création de l’ICSU en 1931. La présence de la psychologie au sein de la plus haute instance représentant la science internationale est une reconnaissance de l’engagement de cette discipline dans l’interdisciplinarité, qui constitue l’une des missions essentielles de l’ICSU. En octobre 2005, l’Assemblée Générale de l’ICSU m’a réélu sur ce poste pour un nouveau mandat de trois ans. C’est à cette même Assemblée Générale que C. Bréchignac a été élue « President Elect » de l’ICSU.

4.4. Nouvelles perspectives: « Réalité Virtuelle et Cognition »

Les évolutions qui ont marqué le paysage des sciences cognitives au LIMSI ont conduit à l’émergence de nouvelles priorités et de nouvelles organisations de l’interdisciplinarité. Au moment où commençait le nouveau quadriennal (1er janvier 2005), la définition de nouvelles perspectives a été pour moi une sorte de devoir de renouvellement intellectuel et scientifique. Cette étape est intervenue au terme de 13 années de mon activité de responsable du Groupe Cognition Humaine (c’est-à-dire à une échéance équivalente à celle qui s’impose classiquement aux responsables en charge des unités de recherche au CNRS). Le bilan du Groupe en termes de collaborations interdisciplinaires internes et externes, de thèses co-encadrées, de publications internationales dans des revues de haut standard où s’illustrent plusieurs disciplines, m’a donné le sentiment d’une mission parvenant à un tournant et m’a incité à envisager le déploiement de mon activité au service d’un nouveau projet interdisciplinaire articulant les perspectives des STIC et celles de la psychologie cognitive.

C’est ainsi que j’ai entrepris de m’investir dans un domaine en forte expansion, tant au LIMSI qu’à l’extérieur du LIMSI, et qui constitue un domaine d’élection pour l’interdisciplinarité: celui de la Réalité Virtuelle (RV), comme méthodologie susceptible de servir des opérations scientifiques originales. Ainsi, j’ai participé depuis 2002 aux activités de l’Action Spécifique du Département STIC « Réalité Virtuelle et Cognition », animée par P. Bourdot (LIMSI) et P. Fuchs (Ecole des Mines). J’ai été membre du Comité Scientifique de l’Ecole Thématique du CNRS « Réalité Virtuelle et Sciences du Comportement », qui s’est tenue sous la responsabilité de D. Mestre à Marseille (mai 2003). Les interpénétrations de la psychologie et des nouvelles technologies de l’information, notamment la RV, ont également constitué le thème du symposium que j’ai organisé dans le cadre du XXVIIIème Congrès International de Psychologie (Pékin, août 2004), avec un titre sans doute légèrement provocateur (« Psychology Meets Technology »), mais symbolique de la démarche originale qui fait se rencontrer aujourd’hui les STIC et les sciences de la vie. On notera qu’à partir de 2006, le département scientifique du CNRS en charge du LIMSI a pris une nouvelle appellation: Sciences et Technologies de l’Information et de l’Ingénierie (ST2I).

Le LIMSI a lancé une Action Transversale de Réalité Virtuelle (VENISE, pour « Virtualité et Environnement Immersif pour la Simulation et l’Expérimentation ») (responsables: P. Bourdot et J. Mariani). Cette Action s’est concrétisée notamment par la construction d’un dispositif générant des environnements immersifs de grande taille (le système EVE, pour « Environnement Virtuel Evolutif »). Il s’agit d’une plate-forme technique dont le potentiel est mis au service de plusieurs types d’utilisations: visualisation de données en 3D, CAO, mais aussi création d’environnements offrant des possibilités originales d’expérimentation pour les sciences cognitives. Il est jugé essentiel par les spécialistes de la RV, tout autant les concepteurs que les utilisateurs, que le développement technologique de ce type d’outil se fasse en concertation avec les chercheurs en psychologie cognitive expérimentale. C’est dans ce contexte que se dessinent les possibilités nouvelles que j’ai commencé à exploiter pour l’étude des processus mis en œuvre dans la cognition spatiale et la représentation mentale des déplacements. Des collaborations sont lancées au sein du laboratoire et avec des équipes extérieures utilisatrices du dispositif de RV du laboratoire.

De 2005 à 2008, j’ai assuré la responsabilité et la coordination d’une nouvelle opération, l’Action « Réalité Virtuelle et Cognition ». Cette activité, rattachée au Groupe Perception Située et à laquelle ont contribué cinq autres membres du LIMSI (une maître de conférences, un ingénieur CNRS, un doctorant et deux chercheuses post-doctorales), a consisté d’abord à veiller à ce que les possibilités technologiques avancées de la RV soient mises de manière optimale au service des problématiques des sciences cognitives et comportementales. La mission consistait alors à susciter et à coordonner les opérations de recherche de sciences cognitives utilisant la RV, qu’elles aient pour origine les équipes du laboratoire ou des équipes extérieures. Au sein du LIMSI, j’ai participé à une opération de recherche impliquant la mise au point d’un environnement immersif audio 3D, à partir duquel étaient étudiées les contributions respectives des représentations visuelles et sensori-motrices dans l’apprentissage d’un environnement spatial (B. Katz, Groupe Perception Située).

Je me suis également impliqué dans un projet utilisant la RV audio en vue d’étudier la représentation mentale de l’espace chez les personnes voyantes et non voyantes. Cette recherche a constitué un des volets importants des activités d’un consortium européen, rassemblé dans le cadre du STREP « Wayfinding » (projet du Programme NEST qui s’est déroulé de 2005 à 2008 et dans lequel ont été associés six groupes de chercheurs, dirigés respectivement par A. Berthoz, H. Bülthoff, N. Burgess, M. Denis, C. Guariglia et A. Postma, coordinateur). L’ensemble de cet investissement s’est également inscrit, au plan européen, dans le Réseau d’Excellence « Intuition » (consortium des laboratoires de recherche européens sur la RV, au sein duquel le LIMSI s’est vu confier par le CNRS la charge de le représenter). Enfin, de 2006 à 2010, j’ai assuré la direction d’une thèse (en collaboration avec J.-M. Burkhardt, de l’Unité Ergonomie, Comportement et Interactions de l’Université René-Descartes) sur la manipulation d’objets tridimensionnels au sein d’environnements virtuels multimodaux. Ces activités se sont inscrites dans le cadre plus général du GDR de Psychologie Ergonomique créé par le CNRS en 2008 (avec pour responsable J.-M. Hoc).

C’est vers la fin de cette période, en 2007, que j’ai bénéficié de la promotion au grade de directeur de recherche de classe exceptionnelle, au titre du Département ST2I du CNRS.

 

5. 2008, année charnière!

L’année 2008 a constitué une étape importante dans le parcours retracé ci-dessus. Par coïncidence, plusieurs charges assez prenantes sont venues à leur terme au cours de cette année (Comité National, IUPsyS, ICSU), ce qui m’a rendu plus disponible pour d’autres engagements. En outre, et fort heureusement, quarante années passées au CNRS m’ont ouvert en 2008 la possibilité d’envisager un bénéfique « changement d’activité ». Ce changement a été parfaitement mis en œuvre grâce au statut de directeur de recherche émérite que le Directeur Général du CNRS a bien voulu m’octroyer. On peut ainsi parler d’un « changement d’activité dans la continuité »…

Je note, incidemment, un détail minuscule, mais amusant. Ma vie au CNRS m’a fait naviguer, pendant 16 années, comme membre d’une section du Comité National dont le numéro a périodiquement fluctué. En 1968, à mon entrée au CNRS, j’ai été affecté à la Commission 21, dont l’intitulé exact était « Psychophysiologie et Psychologie », avant de devenir par la suite la Commission 30. En 1991, au moment où je devenais membre de cette commission (appelée désormais « section »), celle-ci avait été renumérotée, pour devenir la Section 29, puis, en 2004, la Section 27. En 2012, la plus récente recomposition du Comité National l’a transformée en Section 26. L’évolution des contours de la psychologie française et des disciplines qui lui sont associées s’est donc accompagnée, dans les deux dernières décennies, d’une lente mais régulière évolution de sa numérotation vers les plus petits nombres. Au rythme de cette évolution, on pourrait bien imaginer que d’ici un siècle ou deux, si le CNRS existe encore, la psychologie se retrouve dans des altitudes numériques qui attesteraient de son rang de discipline suprême!

Plus sérieusement, on pourrait spéculer sur l’évolution des dénominations de la section, reflet authentique du remaniement des perspectives de nos disciplines dans la période récente. Les ingrédients restent bien entendu les mêmes à travers les mandatures, mais leur séquentialisation affiche (ou suggère) des priorités. Ainsi, tandis que la 29 (« Fonctions mentales, neurosciences intégratives, comportements ») mettait au premier plan les fonctions, la 27 (« Comportement, cognition, cerveau ») privilégiait l’expression de ces fonctions, et la 26 (« Cerveau, cognition et comportement »), à travers un complet basculement des trois termes, donne aujourd’hui la priorité à l’organe qui en est le support.

Dans le cadre de l’éméritat, mes activités au LIMSI se sont poursuivies, en particulier les activités touchant au développement de la RV. L’année 2008 s’est trouvée être celle de la livraison du nouveau bâtiment du LIMSI dédié à la RV. J’ai participé également à la mise en place d’un nouveau groupe au sein du Département CHM, le Groupe Cognition, Perception, Usages (CPU) (resp.: P. Tarroux), qui est plus spécialement en charge des aspects cognitifs et ergonomiques développés au sein du LIMSI, grâce, notamment, à l’arrivée de nouveaux membres (F. Darses et M. Auvray). La psychologie et l’ergonomie confirmaient ainsi leur rôle au sein d’un grand laboratoire français d’informatique, unité propre du CNRS. Par la suite, la responsabilité du Groupe CPU a été reprise par F. Darses en 2010, puis par J.-C. Martin en 2011. Un jeu de départs et d’arrivées au sein du Groupe a donné à celui-ci une nouvelle configuration, où la psychologie continue heureusement de coopérer avec l’informatique sur le thème des interactions multimodales entre humains et agents virtuels.

L’année 2008 a correspondu au lancement d’un nouveau projet de recherche, le projet NAVIG, auquel j’ai participé avec B. Katz et M. Auvray pour le LIMSI. Ce projet, soutenu par le Programme TecSan de l’ANR et par la Région Midi-Pyrénées (resp.: C. Jouffrais), visait à développer un dispositif d’aide au déplacement des personnes aveugles en environnement urbain. J’ai également participé, à partir de 2009, à un autre projet ANR dirigé par V. Gyselinck, le projet SpaLife, qui utilisait les ressources de la RV pour étudier les représentations spatiales, notamment dans une perspective développementale. Une autre forme d’engagement vis-à-vis des sciences cognitives a été ma participation à l’Atelier de Réflexion Prospective PIRSTEC, soutenu par l’ANR et lancé par J. Lorenceau (responsable), J.-L. Schwartz et moi-même. Les sciences cognitives sont également présentes dans le chapitre que j’ai rédigé dans le cinquième volume du Traité de la Réalité Virtuelle, coordonné par S. Donikian pour les Presses des Mines, paru en 2009, ainsi que dans La Psychologie Cognitive, ouvrage dont j’ai coordonné la rédaction pour la collection Cogniprisme, dirigée par C. Fuchs, paru en 2012.

Enfin, les sciences cognitives sont au cœur des projets européens (Advanced Grants) dont je coordonne l’évaluation au sein du European Research Council (ERC), comme président du Panel SH4-B (« The Human Mind and its Complexity »). J’ai également assuré des fonctions d’évaluation à la tête de plusieurs comités de l’ANR (Programme Retour Post-Doctorants, Programme Apprentissages), ainsi que pour l’IUF (Jury Senior) et la Commission Européenne (Action Marie-Curie IAPP).

Ajoutons que l’année 2009 a vu se tenir un très sympathique événement à Padoue, dans l’une des universités que j’ai eu le plus de plaisir à fréquenter tout au long des années. Une initiative associant des collègues de l’Université Paris Descartes (V. Gyselinck) et de l’Université de Padoue (F. Pazzaglia, C. Cornoldi et R. De Beni) a permis d’organiser une rencontre de deux jours, à la fois scientifique et amicale, destinée à m’aider à franchir ma première année d’éméritat en compagnie d’amis et collègues français, européens et nord-américains, notamment ceux de la famille EWIC, dont les chemins ont croisé le mien dans notre investigation commune de l’image, du langage et de la cognition spatiale. Un bel ouvrage, au titre parfaitement suggestif de mon parcours de recherche, « From Mental Imagery to Spatial Cognition and Language », est issu de cette rencontre, grâce aux soins de V. Gyselinck et F. Pazzaglia, publié par Psychology Press (2012).

C’est en 2011 que j’ai eu la fierté de recevoir de J.-M. Monteil les insignes républicains de chevalier de la Légion d’Honneur, au siège du CNRS, en présence de ma famille, de mes collègues et amis du LIMSI et d’ailleurs, et d’A. Fuchs, Président du CNRS.

Membre du Bureau du Comité Français des Unions Scientifiques Internationales (COFUSI), structure placée auprès de l’Académie des Sciences pour suivre l’activité des Comités Nationaux Français, notamment vis-à-vis des Unions Scientifiques Internationales, je suis devenu en 2013 Secrétaire Général de ce comité. A ce titre, j’ai contribué à l’édition du rapport triennal remis à la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche pour rendre compte des initiatives permettant à la science française de se rendre visible sur la scène internationale. Je participe également à la préparation d’un colloque international organisé par Y. Coello à Lille en 2013, sous le titre « Vision, action and concepts: Behavioural and neural basis of embodied perception and cognition ». Cette activité, soutenue par l’Académie des Sciences, résulte de l’initiative conjointe de chercheurs en psychologie, en neurosciences et en philosophie des sciences. Un autre événement de grande portée internationale est le 28ème Congrès International de Psychologie Appliquée, dont j’assure la vice-présidence, et qui doit amener à Paris en 2014 plusieurs milliers de chercheurs en psychologie.

On aura noté enfin que les années 2008 et 2009 ont vu se mettre en place une nouvelle réforme du CNRS… Nul doute que cette réforme (comme toutes celles qui l’ont précédée et celles qui lui feront suite) révélera ses aspects positifs… et, espérons-le, le minimum d’imperfections… J’avoue ne pas avoir compté le nombre de réformes qui ont été mises en œuvre depuis mon entrée au CNRS en 1968, et qui ont souvent créé beaucoup d’émotion dans la communauté des chercheurs. Sans vouloir ironiser outre mesure, je note tout de même que la dernière réforme, celle qui a vu les « Départements » être rebaptisés « Instituts », est aussi celle où le titre de « Directeur Scientifique Adjoint » (DSA) a été audacieusement reformulé en « Directeur Adjoint Scientifique » (DAS).

Quoi qu’il en soit, je vis comme une chance de pouvoir poursuivre l’expérience des sciences cognitives grâce au CNRS, qui reste l’organisme le mieux à même de contribuer à l’interdisciplinarité, dans ce domaine comme dans tant d’autres.

L’année 2013 marque une date importante dans la vie du LIMSI, dont un nouveau directeur, F. Yvon, assure désormais la charge, alors que s’annoncent de grandes recompositions institutionnelles. Je suis heureux d’être le témoin du nouveau défi que le LIMSI relève, celui de sa contribution à la mise en place du Campus Paris-Saclay.

 

Paris/Orsay/Dinard, le 31 août 2008.

Mise à jour: 31 août 2013.